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Et toi, que manges-tu, grouillant ?
— Je mange le velu qui digère le
pulpeux qui ronge le rampant.
Et toi, rampant, que manges-tu ?
— Je dévore le trottinant, qui bâfre
l’ailé qui croque le flottant.
Et toi, flottant, que manges-tu ?
— J’engloutis le vulveux qui suce
le ventru qui mâche le sautillant.
Et toi, sautillant, que manges-tu ?
— Je happe le gazouillant qui gobe
le bigarré qui égorge le galopant.
Est-il bon, chers mangeurs, est-il
bon, le goût du sang ?
— Doux, doux ! tu ne sauras jamais
comme il est doux, herbivore !
Géo Norge, extrait de Famines (1950)
Si l’herbivore savait ce qui se passe au-dedans de lui, quelle faune y digère sa flore, il fleurerait les pâquerettes pour retrouver l’odeur des coquelicots, des tout p’tits coquelicots.