Trop épris de solitude

Je suis de retour, dit-il à l’homme qui l’invite à prendre place sur le divan. Je rentre après deux siècles d’errance. Mon périple est parsemé de fines poussières. J’ai longuement marché, une bougie à la main, de hameaux déserts en zones désaffectées, avançant entre des murs de suie et des troncs d’arbres calcinés. Tout autour, le chant des grillons peuplait la nuit. Au loin, l’enfant que je fus jadis pleurait apeuré dans le lit froid où ont dormi tant de morts.
Je suis sans âge, couvert de cendre, contraint de traverser les générations pour souffler sur les braises de la mémoire familiale.

Jacques Josse, Trop épris de solitude, le Réalgar, [coll. l’Orpiment], 2024