Dans la fibre molle du jour… ~ Jos Roy

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Avec l’aimable autorisation de l’auteur

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dans la fibre molle du jour
aucun nom ne se dessine
quand je mourrai je ne serai pas comme lui
personne ne viendra ramasser les restes de mon souffle
ce sera comme si rien n’avait existé la mémoire tombera
au fond d’une fosse commune & ce n’est pas joyeux de dire cela
mais depuis le début on le sait : les pierres ne nomment pas les pierres
& le chaos demeure chaos dans le plus froid des silences –
la parole est un oiseau de passage.
il faudrait pour bien faire
modeler une cosmogonie
la peupler d’éléments & de bêtes de liens de chutes
finir par des hommes des femmes des créatures
complexes amalgamant imaginaire & biologie
mais ce corps est rongé par le doute
c’est pourquoi aucun nom sur lui ne tient
aucun dieu n’y trouve sa pitance
aucun amour n’a de quoi passer l’hiver
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Jos Roy, 24 X 2015, extrait de Corps&biens
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Chevaux ~ Jean-Jacques Marimbert

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Depuis Au jour, la nuit,
avec l’aimable autorisation de l’auteur

 

Chevaux
 
Ruelles et façades
ne sont plus qu’ombres
tachées de sang
pas égarés creusent
une terre poussiéreuse
deux trois chiens flairent
çà et là des lambeaux
de présences effacées
il marche
en un ciel de fumées
que le vent mêle
aux fins nuages de glace
il marche
les lumières du soir
dessinent au sol des flaques
de clarté froissée ridée
reflets de fenêtres
il avance franchit
des seuils inconnus
pénètre dans des cours
aux pavés luisants ressort
descend vers le fleuve
les chemins se perdent
l’eau calme et lourde charrie
les troncs morts les pensées
jette à la mer les vies obscures
toutes ces vies croisées frôlées
sur les boulevards
sur le chemin de halage
il sent le souffle puissant
des chevaux de jadis
dans ses épaules la brûlure
des sangles de cuir
il entend gémir
le bois des péniches
il suit la berge
quitte la ville et
rejoint les chevaux
dans la nuit
des prairies oubliées.
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21 janvier 2014
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à celle qui n’est ~ Francis Royo

 

Monch, Fuite en avant

Monch, Fuite en avant

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à celle qui n’est

même pas le silence. mais le chaos qui l’a construit de ses mains absentes.
même plus la pluie mais les maisons inachevées

la douleur d’elle comme seule parole
la douleur qu’elle
assassine sous nos yeux
et les mots
les siens
cadavres nus
trames d’amour usées
jusqu’à l’éclaté noyau du monde

la vie même folie
qui n’a plus de nom
d’haleine
de pierres pour crier

et le vent tombé
ce trou noir
où s’engouffrent les chats

Francis Royo, Bribes 8.6
sur Analogos